Le Silence : L'élève et le Maître
le Silence
Le Disciple : Maître, pourquoi rester silencieux ? (Long silence) Le Maître : Mon fils, tu viens de vivre le silence et la réponse à ta question est tout entière contenue dans ce que tu as ressenti. Le Disciple : Maître, ta parole est sage et belle, mais je ne suis pas Suffisamment avancé encore sur le chemin de la Sagesse pour comprendre. Le Maître : Pour comprendre il est d’abord nécessaire de ressentir ! Le Disciple : Même cela, je ne le puis qu’imparfaitement. Parle-moi du silence ! Le Maître : De quel silence est-il question dans ta bouche ? Le Disciple : Y a-t-il plusieurs silences ? Le Maître : Certes… Réfléchis… Il y a le silence de tes oreilles et le silence de ta bouche. Il y a le silence que tu entends — tu es alors source de bruit entourée de silence — et le silence que tu émets, et tu es alors source de silence, fut-ce au milieu du plus grand bruit. Et ces deux formes de silence ne sont pas identiques. Et la seconde seule est active, seule elle est positive. Le Disciple : Est-ce pour cela que tu m’interdis la parole ? Le Maître : Sans doute. Mais détrompe-toi quant à l’apparence de cette interdiction. Contrairement à ce que tu sembles penser, le silence que je t’impose n’est en aucun cas une brimade. Tu y as d’ailleurs librement consenti. C’est un outil permettant ton évolution vers la Lumière. Encore faut-il que tu réussisses à le percevoir ainsi pour le mieux vivre. Le Disciple : Et comment puis-je y parvenir ? Le Maître : Considère ce silence comme une tentative de mise en harmonie de tout ton être avec le cosmos. Le Disciple : De tout mon être ? Le Maître : Certes. Car le silence efficace n’est en aucun cas un état passif. C’est une action positive, c’est une écoute attentive de l’autre, de l’environnement, de l’Univers. Le silence ainsi vécu possède une profonde signification symbolique. C’est une force. Il permet de recréer en soi l’Unité primordiale. Il n’est pas un non-bruit mais un état de mise en communion. Le Disciple : Avec tous ? Le Maître : Avec tous ceux qui y sont suffisamment sensibles, tout au moins. Dans certaines assemblées, il participe à l’éclosion de l’égrégore. Le Disciple : Maître, ton enseignement m’ouvre des portes insoupçonnées. Le Maître : Je ne t’ai ouvert aucune porte. Tout au plus t’ai-je indiqué leur existence et leur emplacement. Toi seul les a ouvertes. Mais puisqu’il en est ainsi, écoute : « Ne parle pas, médites ! N’écoute pas, entend ! Ne regarde pas, vois ! Ainsi, tu entendras le langage de toute la nature à travers tes oreilles et à travers tes yeux. Tu entendras à travers tous tes sens et tout ton être… Abolis ton savoir, et tout en toi s’ouvrira pour recevoir la connaissance… Ne cherche pas à transmettre ta pensée, ta conscience : contente-toi de chanter suivant ton rythme et suivant ton harmonie. Celui qui est « vrai » t’entendra. » Le Maître et le Disciple méditèrent ces paroles en silence durant quelques instants. Le Maître : Toute la puissance symbolique du silence est contenue dans ces paroles. Le silence est avant tout l’écoute attentive, l’acte de respect profond à l’autre ; c’est, par excellence, l’outil qui permet de communiquer avec les êtres vrai qui nous entourent. Ce n’est pas une absence de paroles par inattention, mais une action forte. Il est certains silences assourdissants. Cette qualité du silence doit faire pénétrer en nous, au plus profond de notre coeur, la certitude qu’il est plus important de laisser l’autre s’exprimer plutôt que d’étaler, souvent inutilement, nos propres idées. Paraphrasant un dicton célèbre je dirai : « les paroles s’envolent, mais les silences restent ! » .